Commentaire de marché - Octobre 2025

🌏 Introduction Générale : des marchés sous tension mais qui restent bien orientés

Les actions mondiales ont connu une forte volatilité en octobre, marquée par une nervosité accrue des investisseurs. Cette tension s’explique par plusieurs facteurs : les discours divergents des membres de la Réserve fédérale (Fed) remettant en question la baisse de taux anticipée en décembre, le shutdown du gouvernement américain — devenu le plus long de l’histoire — et les craintes sur la valorisation des valeurs technologiques.

Malgré ce contexte tendu, les actions mondiales ont terminé le mois en hausse de 3,7 % (libellées en euros). Cette progression s’appuie essentiellement sur des données macroéconomiques témoignant d’une économie globalement résiliente et des résultats d’entreprises solides. Aux États-Unis notamment, 83 % des sociétés ayant publié leurs résultats ont dépassé les attentes des analystes.

Les actions américaines ont d’ailleurs nettement surperformé les actions européennes, progressant de 4,0 % sur le mois contre 1,4 % pour les actions de la zone euro. Ces dernières ont été pénalisées par un contexte politique toujours incertain et une activité qui reste atone dans l’industrie.

🇺🇸 États-Unis : la discorde de la Fed et le shutdown historique

La Réserve fédérale (Fed) a, comme attendu, abaissé son taux directeur de 0,25 %, à une fourchette de 3,75 %–4,00 %, tout en adoptant un ton plus prudent. Jerome Powell a souligné qu’une nouvelle baisse en décembre n’était « pas acquise », invoquant le manque de données officielles liées au shutdown du gouvernement fédéral et les divergences persistantes au sein du comité. La nervosité des investisseurs a été exacerbée par les prises de parole contradictoires des membres de la Fed. Le débat interne oppose ceux qui plaident pour de nouvelles baisses de taux en raison de la fragilité du marché de l’emploi et ceux qui s’y opposent, alertant sur la vigueur et la persistance de l’inflation.

Le shutdown du gouvernement américain est désormais le plus long de l’histoire, dépassant le record précédent de 35 jours (fin 2018 – début 2019). Ses conséquences négatives potentielles sur l’économie américaine ont poussé les partis vers un dialogue accru, rendant un compromis plus probable dans les prochains jours. La plupart des données économiques ne sont toujours pas publiées, ce qui complique la tâche de la Fed et des investisseurs.

Les indicateurs avancés ISM et PMI continuent toutefois d’être publiés. L’ISM Manufacturing est ressorti en légère baisse, toujours sous le niveau de 50, confirmant les difficultés du secteur industriel. Du côté des services, l’environnement est meilleur avec des indicateurs PMI et ISM au-dessus de 50 (respectivement 54,8 et 52,4). La composante « nouvelles commandes » de l’ISM des services s’est nettement améliorée, passant de 50,4 à 56,2, largement au-dessus des attentes. Au global, la croissance du troisième trimestre a été robuste, mais celle du quatrième trimestre pourrait être plus faible. Le moral des ménages reste très bas et l’emploi est au point mort. L’enquête ADP a montré de faibles créations d’emplois en octobre, et le « Challenger Job Cuts » indique une forte remontée des licenciements.

À l’international, les tensions sino-américaines se sont dans un premier temps intensifiées. La Chine a renforcé ses contrôles sur les exportations de terres rares et imposé de nouvelles taxes portuaires sur les navires américains, tandis que Donald Trump a menacé d’appliquer de nouveaux droits de douane de 100 % sur les produits chinois. Mais ce volet géopolitique a finalement été marqué par une détente significative des relations commerciales entre la Chine et les États-Unis. La Chine a réduit de 24 % ses droits de douane sur les produits américains pour une durée d’un an, en contrepartie de la réduction des droits de douane américains sur le fentanyl. La Chine a également suspendu les contrôles sur les exportations de certaines terres rares, apaisant les tensions sur ce secteur stratégique. Par ailleurs, Donald Trump a conclu un autre accord majeur a été conclu avec la Corée du Sud, prévoyant la création d’un fonds d’investissement bilatéral de 350 milliards de dollars dédié notamment à la construction navale et à l’énergie, ainsi qu’une réduction des droits de douane sur les voitures coréennes.

🇪🇺 Zone euro :

La Banque centrale européenne (BCE) a décidé de maintenir ses taux d’intérêt directeurs inchangés, confirmant ainsi une approche prudente dans un contexte de stabilisation progressive des prix. L’inflation dans la zone euro continue de converger vers l’objectif de 2 %, atteignant 2,1 % sur un an. Cette évolution masque toutefois certaines disparités : la baisse des prix de l’énergie a contribué à atténuer la pression globale sur les prix, mais plusieurs grandes économies affichent encore des tensions inflationnistes. En Espagne, l’inflation s’élève à 3,2 % sur un an, tandis qu’en Allemagne, elle atteint 2,3 %, reflétant des dynamiques nationales contrastées.

La BCE a par ailleurs mis en avant la résilience de l’économie de la zone euro, malgré une croissance toujours hétérogène entre les États membres. En Allemagne, les indicateurs d’activité témoignent d’un rebond notable : l’indice PMI composite s’établit à 53,8, contre 51,5 attendu, tiré par la vigueur du secteur des services. En France, la situation demeure plus morose. Le PMI composite recule à 46,8, en deçà des anticipations (48,4), sous l’effet d’un net ralentissement des services. Cette faiblesse est accentuée par une détérioration du climat politique et une confiance des ménages en berne.

Sur le plan politique, la nomination de Sébastien Lecornu au poste de Premier ministre a permis d’apaiser temporairement les tensions. Les concessions faites au Parti socialiste — suspension de la réforme des retraites et abandon du recours au 49.3 — ont permis d’éviter de justesse une motion de censure, rejetée à 18 voix près. Le nouveau gouvernement s’attache désormais à restaurer la stabilité politique et à préserver la crédibilité budgétaire du pays. Le projet de budget prévoit un déficit public contenu sous les 5 % du PIB, une annonce bien accueillie par les marchés financiers, qui y voient un signal de continuité et de responsabilité.

Cependant, les fragilités structurelles de l’économie française demeurent. L’agence de notation S&P Global Ratings a récemment abaissé la note souveraine de la France de AA- à A+, invoquant une trajectoire d’endettement préoccupante. La dette publique devrait, selon ses projections, atteindre 121 % du PIB d’ici 2028, en raison notamment de marges budgétaires limitées et d’un contexte politique contraignant. Si cette dégradation n’a pas provoqué de choc immédiat sur les marchés, elle souligne néanmoins la vulnérabilité de la France face aux exigences de consolidation budgétaire et aux incertitudes économiques européennes

🇨🇳Chine

En octobre, l’indice PMI manufacturier chinois est tombé à 49,0, contre 49,8 en septembre, atteignant ainsi son plus bas niveau depuis six mois et demeurant sous le seuil des 50, synonyme de contraction de l’activité. Ce repli confirme le ralentissement de la dynamique industrielle face à une demande intérieure encore fragile.

Sur le plan macroéconomique, la croissance du PIB s’établit à 4,8 %, en deçà de l’objectif officiel de 5 %, traduisant les difficultés persistantes du marché domestique. Les ventes au détail, en hausse de seulement 3 % (contre +4,4 % attendu), affichent leur rythme le plus faible depuis le début de l’année, témoignant d’une confiance des ménages encore hésitante malgré les mesures de relance ciblées.

À l’inverse, le secteur extérieur a constitué un levier de croissance au troisième trimestre. La production industrielle a progressé de 6,5 % en glissement annuel, dépassant les attentes de 5 %, tandis que les exportations ont enregistré une hausse de 8,3 %, supérieure aux 6,6 % anticipés. Si les exportations vers les États-Unis ont chuté de 27 % en septembre — marquant un sixième mois consécutif de baisse à deux chiffres — cette faiblesse a été largement compensée par la vigueur des ventes vers d’autres régions, notamment l’Union européenne et les marchés émergents d’Asie du Sud-Est.

Face à ces disparités sectorielles, les autorités chinoises ont intensifié leurs efforts de soutien ciblé. Le gouvernement a notamment augmenté les subventions énergétiques afin de réduire de moitié les factures d’électricité de certains des plus grands data centers du pays, à condition que ces infrastructures utilisent des semi-conducteurs produits localement — une mesure inscrite dans la stratégie nationale de souveraineté technologique.

Parallèlement, les autorités locales envisagent de reprendre les achats de blé américain pour la première fois depuis un an, signe d’un assouplissement pragmatique des relations commerciales agricoles entre Pékin et Washington. Dans le même esprit, les États-Unis ont annoncé la suspension pendant un an des frais portuaires imposés aux navires liés à la Chine, un geste perçu comme un signal d’apaisement dans un contexte de rivalité économique persistante.